"Dans le cochon tout est bon", dit le dicton, ce que Laurent corrigerait par "tout est beau" en offrant à l’animal adoré et dénigré une série de scènes et portraits en noir et blanc simples et tendres, prise dans des fermes et refuges français qui oeuvrent pour une meilleure considération du suidé et notamment le refuge GROINGROIN. Dans le prolongement de son engagement militant et de son discours antispéciste, Laurent explore un nouveau sujet artistique en marge des sentiers de la savane africaine, des plaines de l’ouest américain et des déserts gelés de l’Arctique.
Hors les murs des élevages industriels, en liberté et en plein air, le bestiaire fermier de Laurent prend de la substance et de la prestance. Cochons, moutons, chèvres, chevaux, vaches, poules, canards, lapins ou encore dindons sont ainsi saisis par le photographe-portraitiste qui aime à révéler l’identité et la personnalité de ses sujets.
Éluder les approches naturalistes au profit d'une approche animaliste où l'individu prime sur l'espèce
Laurent explique : « Ce que je cherche, c’est cet instant furtif où la photographie racontera le caractère de l’animal.
Comme j’ai tenté de le faire avec la faune sauvage en éludant les approches naturalistes au profit d'une approche animaliste où l'individu prime sur l'espèce, j’ai envie de démontrer qu’il n’existe pas de frontières entre les animaux. Sauvage, domestique, d’élevage ou nuisible, l’animal reste un être sensible, capable d’aimer, de détester, d’avoir peur et de souffrir. Ce sont les hommes qui classent, trient, ordonnent et organisent selon leurs besoins et leurs priorités souvent par souci de praticité, de productivité et de rentabilité.»
Les premières photographies sont présentées en 2018 avec le livre
ANIMALITÉ co-écrit avec la philosophe Audrey Jougla et publié le jour de la Journée mondiale sans viande. Il sera le point de départ d’une collection riche d'une centaine d’images monochromes dont une sélection est présentée ici.
Cette nouvelle série photographique fait écho au lien qui unit animaux d'élevage et animaux sauvages
Quand les premiers croissent, les seconds décroissent. Laurent ajoute que « 100 milliards d’animaux seront "produits" chaque année d’ici 2050 pour répondre à la consommation de viande mondiale qui a déjà doublé entre 1960 et 2020. Une déforestation massive déjà en action est nécessaire car 70% des terres agricoles servent à nourrir l'élevage sans compter les pollutions du sol, de l'eau et de l'air qui lui sont liées. » Ainsi, le sort tragique réservé à la faune sauvage dépend inéluctablement de celle qui alimentera notre assiette. Plus de viande= moins d'espaces et d'écosystèmes préservés.
Ces chiffres qui donnent le vertige donnent surtout envie au photographe de contribuer à faire évoluer nos regards, à dépasser nos seuls plaisirs gustatifs et à changer nos habitudes… alimentaires et vestimentaires bien sûr.